[Edito] L’intuition, un sixième sens négligé

Un court article et une réflexion moins profonde qu’à l’accoutumée afin de garder ce blog actif. Je suis extrêmement soucieux du contenu que j’y publie, c’est pourquoi il n’y a que très peu de billets publiés. Trois nouveaux articles sont actuellement en gestation¹. De plus, je traduis progressivement mon eBook Kindle en anglais, l’améliorant et l’adaptant au public anglo-saxon au passage. Cet article parlera de notre intuition.

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Alexandre Letellier avec le public angevin, suite à une victoire en janvier 2016

L’intuition héroïque d’Alexandre Letellier

Ce mardi avait lieu la demi-finale de coupe de France de football entre le SCO Angers et l’En Avant de Guingamp. En toute fin de match, alors qu’Angers mène par 1 but à zéro, l’arbitre siffle un pénalty sur une faute inexistante en faveur de Guingamp. Une énorme pression s’abat alors sur les épaules du gardien angevin, Alexandre Letellier. Il est alors le seul a pouvoir sauver son équipe d’une égalisation très probable et d’une élimination éventuelle de la compétition. Il sautille dans sa cage, se dégourdit les deltoïdes par quelques moulinets. La retransmission télé nous montre alors le visage de son vis-à-vis, qui s’apprête à tirer le pénalty. Ce dernier, à cet instant, me semblait fébrile. Pourquoi ? Une intuition.
Avais-je raison ? Il s’élance et tire sur sa gauche. Letellier bondit sur la balle et d’une main assurée la propulse sur son poteau. La balle sort. Ovation. Angers se qualifie en finale de coupe de France pour la première fois depuis 60 ans. En conférence de presse, interrogé sur ce qu’il s’est passé dans sa tête à ce moment là, Letellier expliquera qu’il a simplement suivi son intuition.

Simplement ? Non, il précisera aussi avoir étudié en vidéo les précédents pénaltys tirés par le joueur de Guingamp. Consciemment ou non, il aurait percuté un élément redondant, qui aurait aiguillé son intuition sur le fait qu’il fallait bondir sur sa droite. Il n’avait qu’une seule chance, inférieure à 30% selon les statisticiens du football², d’arrêter ce tir au but. Son intuition lui a permis d’arrêter le tir d’un geste sûr et efficace.

Qu’est-ce que l’intuition au final ?

Voici la définition qu’en donne le dictionnaire Larousse³ « Connaissance directe, immédiate de la vérité, sans recours au raisonnement, à l’expérience. Sentiment irraisonné, non vérifiable qu’un événement va se produire, que quelque chose existe : Avoir l’intuition d’un danger. »

L’intuition serait un recours à la mémoire non-déclarative. Un « message » du subconscient à notre conscient, basé sur l’expérience, sur l’ensemble de notre vécu dont nous ne pouvons consciemment nous souvenir. Dès lors, cette intuition se construit avec le temps et la pratique. L’observation. On en revient invariablement à notre culte de la répétition : plus vous faîtes, mieux vous faîtes. L’excellence n’est pas un acte isolé mais une habitude (Aristote dans le texte).

Travailler son intuition, c’est donc tout simplement accumuler les expériences. Provoquer les opportunités, parler aux gens, expérimenter, être curieux. Dans le cas du gardien de but : travailler son sujet par des séances de tirs aux buts à l’entraînement, par l’observation des gestes des joueurs de l’équipe adverse. Certains éléments, indécelables, dans l’attitude et les mouvements du joueur guingampais, ont certainement alerté son subconscient sur le panel de possibilités de ce joueur. Son expérience a fait le reste. Bravo Alex !

Pour extrapoler : intuition et rapports sociaux

Mais alors, le joueur guingampais était-il fébrile comme mon intuition me l’a soufflé ? Il semble que cette intuition était partagée par d’autres spectateurs, après discussion.
Notre intuition peut-elle nous aiguiller sur les émotions, intentions et états d’esprits de nos semblables ? Attention, ce qui va suivre n’est nourri d’aucune recherche scientifique, il ne s’agit que du développement de ma réflexion.

Nous sommes une espèce profondément empathique, conçus pour agir en société selon une réalité économique qui veut que la collaboration soit plus profitable que l’action égoïste (amenant à penser que l’altruisme est une forme d’égoïsme, mais c’est une autre histoire). Notre intuition, en ce sens, est donc la somme des situations sociales vécues et ressenties, réellement ou non (le cinéma a cette justesse de quasi-systématiquement représenter des comportements humains cohérents), et vraisemblablement aussi d’une part d’héritage génétique. Nous sommes donc prédisposés à lire le langage non-verbal d’autrui (80% de la communication selon divers ouvrages de programmation neuro-linguistique).

Toutefois, si nous excellions tous dans l’intuition des sentiments d’autrui, notre société serait infiniment plus paisible (et prompte à collaborer). Il apparaît que certains individus bénéficient donc d’une plus forte intuition qu’autrui. Passons sur le pourquoi, je n’ai aucune théorie à avancer sur le sujet (éducation ? rapports familiaux pendant l’enfance ? génétique ?).
Mais, car c’est ce qui nous intéresse, comment peut-on aiguiser son « intuition d’autrui », son empathie ? Toujours dans un strict sens d’observation, pas de dialogue.

Deux éléments de réponses :

  1. L’expérience. La « pratique » des rapports sociaux, au fil de la vie, les dialogues, etc. Une transposition brut de ce qui était avancé en première partie d’article.
  2. L’exposition aux cultures étrangères. Il apparaît que tous les êtres humains possèdent un tronc commun de rites (par exemple, le sourire). Lorsque l’on voyage et que l’on échange avec des autochtones, fatalement nous sommes confrontés à des façons d’être et de voir la vie qui sont différentes de la nôtre, de ce à quoi nous sommes habitués. Toutefois, il reste ce « tronc commun », qui comporte nos émotions. Consciemment ou non, au fil des contacts, nous discernons ce qui nous rapproche et ce qui nous éloigne d’un autre individu dont nous ne partageons ni la langue ni la culture. Ce serait donc un bénéfice supplémentaire à ajouter à la liste déjà conséquente de bonnes raisons de voyager.

Bref, si vous voulez arrêter des pénaltys, prenez l’avion.

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¹ Un premier sur la discipline, sous l’angle de la musculation et des finances personnelles ;
Un second sur la mémoire procédurale, faisant suite à l’article sur le pilotage ;
Un troisième sur l’apprentissage d’une langue étrangère qui parlera de mon expérience avec le russe.

² http://passeurdesciences.blog.lemonde.fr/2014/07/03/football-la-science-du-penalty/

³ http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/intuition/44033

 


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